ŒUVRE
Comprendre le style de Julien Drevelle, c’est d’abord s’intéresser aux rapports qu’il entretient avec l’univers et les savoir-faire du Cognac.
L’omniprésence du point, observable jusque dans le détail des tracés exécutés par l’artiste, se réfère directement aux paysages culturels de la région; ces Torula Compniacensis indissociables des eaux-de-vie dont ils s’abreuvent et des chais de stockage qu’ils recouvrent au fil des saisons. Son œuvre s’inscrit dans un rapport au temps long, à des cycles de production, d’observation, de sélection et d’assemblages, s’étendant parfois sur plusieurs années.
Pour Drevelle, la peinture commence avec une intensité saisissante dès les premières étapes de tension et d’enduction des toiles sur châssis. Le grand format est au cœur de sa production, avec tout ce qu’il suppose d’implication physique et de dépassement de soi. Le rendu pictural tout à fait singulier de ses œuvres repose sur une parfaite maitrise de l’emploi de colles, d’encres d’imprimerie, et de marouflage de papiers industriels sur toile.
Recouvrir, découvrir, faire apparaitre et disparaitre. Le peintre s’émerveille devant l’imprévu, laisse l’accident s’exprimer ; il compose avec la volonté propre de la matière et du support. Puis il se retire, laisse place à l’artiste. Observer, ressentir, prendre de la distance ; tenter d’apprécier sans orgueil la force et la faiblesse de son travail, rechercher l’équilibre et la stabilité esthétique. Faut-il s’arrêter ou continuer ? Rajouter ou enlever ? Sacraliser ou détruire ? Des choix sont faits.
Le peintre et l’artiste, comme deux aspects constitutifs d’un seul être, collaborent, s’alternent et se succèdent. Ils autorisent une respiration nécessaire entre l’acte créateur et l’émotion décisive, cet instant où l’œuvre, quasi vivante, déclare son indépendance au plus profond du cœur de son créateur.
L’artefact s’exprime alors. Ses traits, ses points, sa surface tantôt rugueuse comme l’écorce, tantôt douce et crayonnée, vibrent. Les couleurs résonnent, les formes de lumière bougent au grès des mats et des brillants. Minérale, pittoresque, architecturée, animale et végétale ; l’œuvre de Julien Drevelle est un voyage au cœur d’une île de contrastes, riche d’une infinité de rencontres entre le sublime de la nature et l’ingéniosité de l’ouvrage humain.
Understanding Julien Drevelle’s abstract style means, first of all, taking an interest in the relationship he has with the ancestral know-how and unique atmosphere of the Cognac region.
The omnipresence of the dot, observable even in the details of the lines executed by the artist, refers directly to the typical landscapes of the area: these Torula Compniacensis, which grow speck by speck over decades on the walls of cognac ageing cellars. Drevelle’s creative path is rhythmed by long cycles of production, observation, selection and blending, just like a master cellar produces his finest Cognac.
The very unique pictorial rendering of his work is based on a masterful use of local industrial materials – such as printing inks, glues and packaging papers- distorted from their initial purpose. Julien Drevelle paints with a fascinating physical intensity, from the first steps of setting the canvas over the chassis, until the last stroke of brush. He is naturally oriented towards large formats, in which lie the heart of his work.
Through his daily practice, the painter marvels at the unexpected, letting the accident express itself; he composes with the specific will of the painting, then lets his critical eye make the crucial structuring decisions, in a quest of balance and esthetical stability. The painter and the artist, as two complementary halves of a single being, collaborate, alternate and succeed one another, authorizing a necessary breathing space between the concrete action and the spiritual decision. The painter shapes the physical dimension of the work, the artist feels and guides its emotional realm, until the day the artefact claims its independence.